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Rapport Sauvé – Une bombe à construction massive

Le rapport Sauvé, rendu le 5 octobre dernier par la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase) en France, fait l’effet d’une bombe. Il révèle notamment que l’institution ecclésiastique est le milieu le plus propice aux violences sexuelles, après le cadre familial.

La qualité, soulignée de toute part, des recommandations proposées par le rapport offre l’occasion pour l’Eglise de se reconstruire différemment, d’une réforme en profondeur. Une réflexion que nous vous proposons d’ouvrir, ici en compagnie de Joël Pralong, prêtre et écrivain.

 

 

« Le Rapport Sauvé est bien une bombe. Une bombe à construction massive. A un moment donné, pour laisser sortir ce qui est bon, ce qui est profondément évangélique et qui vient de Dieu, on doit passer par ce séisme. Pour reconstruire une Eglise par le coeur. Sans rejeter ceux qui ont eu ce genre de difficultés, qui ont dérapé. Il y a aussi un devoir de l’Eglise, après l’onde de choc, de prendre soin de ceux qui ont commis ces crimes.

 

Un élément de réponse consiste à mettre au jour l’humanité des ministres, prêtres ou laïcs. L’Eglise a été décrite par Léon XIII comme « société parfaite », identifiée à une perfection purement morale, une perfection qui n’est de fait pas du tout évangélique. Quand on rentrait au séminaire pour se former, on était condamné à être cet homme au-dessus des autres, cet homme parfait qui n’acceptait pas son humanité, qui n’acceptait pas d’avoir une sexualité, des pulsions. Le renoncement évangélique n’est pas le déni de ses besoins. Le renoncement, au sens évangélique, c’est renoncer à certaines choses qui sont bonnes, comme le désir, pour s’attacher au Christ. Un sacrifice, mais pas un déni.

 

Le désir est toujours là ; il s’agit de le travailler pour l’intégrer à sa personnalité, pour en faire une force de vie. Si on en est conscient, ce dynamisme peut être une énergie puissante, un tremplin pour le don de soi. Si on le refoule parce qu’on le voit comme négatif, il va forcément se venger tôt ou tard. Le retour du refoulé de cette humanité niée va remonter, notamment par des mécanismes de défense comme par exemple le cléricalisme. Je me focalise sur un pouvoir pour exister, puisqu’il y a quelque chose en moi qui n’existe pas. La principale compensation d’une frustration sexuelle, c’est souvent le pouvoir, l’avoir et la puissance. Et quand je dis pouvoir, je dis également abus de pouvoir, abus de conscience, qui peuvent aussi déraper en abus sexuel.

 

Travailler l’humain, ça veut dire aussi travailler la question de l’autorité  – comment permettre à l’autre d’être toujours davantage auteur de sa propre vie -, mais aussi les notions  d’image, et d’image de soi, la question de l’obéissance, la collaboration avec les laïcs.  

 

Ce n’est que le début. ».

 

Pour en savoir plus sur le rapport Sauvé :

Rapport final – Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (ciase.fr)

Pour poursuivre la réflexion avec Joël Pralong :

Quels prêtres pour demain ? Sortir de l’abus d’autorité, Joël Pralong, Médiaspaul, 2021 – YouTube