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Pèlerins d’espérance

Le Pape François a choisi de placer cette Année Sainte sous le thème de l’espérance. Une vertu à accueillir et cultiver ensemble, en chemin, pour devenir une Église de « pèlerins d’espérance ». La notion de pèlerinage est donc particulièrement soulignée en cette année jubilaire.
Dans son ouvrage « Par un long chemin vers Toi » (Paris, Cerf, 1978), le père dominicain Albert-Marie Besnard a posé les fondements d’une spiritualité du pèlerinage. Pour lui, le pèlerin n’est pas tellement à la recherche de quelque chose, que de Quelqu’un. Les chemins de pierre de nos montagnes et de nos sanctuaires sont ainsi jalonnés « invisiblement de bornes qui commémorent pour Dieu les endroits où il a rencontré ses pèlerins et où ceux-ci l’ont reconnu… bienheureuse courbature par laquelle une certaine vie est oubliée et la vraie est en train d’être gagnée » (p. 13). Dans l’Evangile, « l’enfant prodigue s’est levé en vertu de la seule image capable de le remettre debout : le visage de son Père » (p. 26). Le pèlerinage est donc une manière de traduire, existentiellement, notre désir de revenir à Dieu.
Pour cela, il nous faut quitter l’esclavage de nos attachements, et prendre le risque du départ. Prisonnier jusque-là de ce qui l’entravait et le retenait, le pèlerin fait l’expérience libératrice d’un affranchissement. Le pèlerinage nous permet en effet de mettre chaque chose à sa juste place dans nos vies. Il nous donne d’en resituer les différents éléments à leur bonne distance, les unes par rapprochement, les autres par éloignement, afin de pouvoir « déchiffrer le dessin, toujours un peu obscur et tremblant, de (notre) vocation » (p. 12). « Celui qui part, écrit le P. Besnard, brise le cercle de ses habitudes et trouve le destin devant lui comme la promesse d’une route indéfinie. Il aura connu ce départ, il l’aura aimé – cette façon de s’en aller en laissant toutes choses, prêt à les reprendre ou à ne les plus jamais trouver » (p. 23-24).
Le pèlerinage exprime ainsi le chemin de toute vie. « On se tromperait si l’on pensait que cet homme s’est mis en route pour le seul souci d’arriver. C’est à exister qu’il s’efforce avant tout. Marcher ne signifie pas tellement se déplacer d’un lieu à un autre que s’enfoncer dans une certaine qualité d’événement et de durée » (p. 93).
En cette Année Sainte, cette invitation à devenir « pèlerins d’espérance » nous renvoie immédiatement à la dimension synodale (« faire route ensemble ») qui caractérise l’Eglise voulue par le Pape François. Que nos démarches jubilaires nous y conduisent, quel que soit le chemin : « Si la route est dure, c’est pour que le cœur cesse de l’être. Si la route est ouverture et accueil, c’est afin que le cœur le devienne » (p. 35).
Pierre-Yves Maillard