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Joseph Voutaz: le chanoine qui aiguille deux secteurs

Le chanoine Joseph Voutaz devant la très belle crèche de l’église d’Orsières.
Photos: Claude Jenny
Accrochez des wagons, ce n’est pas si facile! Un cheminot vous le dira. En ferrovipathe, le chanoine Joseph Voutaz sait le faire sur sa maquette géante dans le galetas de la cure d’Orsières. Mais, depuis la dernière rentrée pascale, il a dû apprendre à «accrocher» des wagons d’un autre ordre: deux secteurs paroissiaux. Celui d’Entremont et celui de Bagnes, ce dernier ayant vécu une période à fortes turbulences. Et le « cheminot modérateur » dit apprécier ce rôle, avec pour objectif premier de semer la bonne entente. Les déraillements, il n’aime pas ! Par contre, il apprécie ses paroissiens et l’équipe avec laquelle il travaille.
Détailler l’organigramme mis en place conjointement par le nouveau prévôt de la Congrégation du Grand-St-Bernard et l’évêque du diocèse pour desservir les secteurs de Bagnes et d’Entremont nécessiterait une grande infographie tant la répartition mise en place est complexe Résumons, pour dire que, comme le relève le chanoine Joseph, «nous vivons un montage particulier, les deux secteurs dépendants désormais officiellement de la Congrégation du Grand-St-Benrard, mais avec deux communautés parallèles desservies par une équipe qui oeuvre sur les deux secteurs».
«On peut parler d’une fusion du clergé au niveau de la desservance, mais pas de fusion des deux secteurs. Avec le Père Damien, prêtre diocésain venu du Rwanda avec lequel il partage les responsabilités, le chanoine Joseph exerce la fonction de modérateur sur la presque totalité de toute la vallée. Les deux sont aidés par un diacre, Nicolas Carron, qui officie comme facilitateur au sein de la paroisse de Bagnes tout en étant actif ailleurs, notamment à Orsières. «Il apporte une aide précieuse car il apporte un autre regard sur la vie des deux secteurs» note le chanoine qui, globalement, trouve que cette nouvelle structure s’avère positive, car elle vise à trouver un équilibre.
De la synodalité interne
«Nous nous employons à faire de l’horlogerie fine ou, en d’autres termes, à apprendre à vivre la synodalité entre nous» souligne le chanoine Joseph pour qui la recherche de la bonne entente est permanente et prioritaire. Les déraillements, à l’évidence, en bon « curé-cheminot », il n’aime pas! Il a choisi d’être prêtre et de rejoindre la congrégation du Grand-St-Bernard, pour cultiver le vivre ensemble et la fraternité. Et veille à cultiver cet état d’esprit au quotidien. Présent à Sembrancher depuis plus de 8 ans, il connaît bien l’Entremont. «Une communauté très engagée et, c’est à relever, dont le dynamisme repose beaucoup sur le bénévolat» relève le chanoine Joseph qui s’emploie désormais à fraterniser avec la communauté de Bagnes. «J’essaie d’être présent à mi-temps dans les deux secteurs avec des mentalités et des fonctionnements différents mais nous avançons sur le bon chemin». La maquette pastorale de toute la vallée se met gentiment en place avec un «aiguilleur» expérimenté! S’il dirige les trains de sa maquette depuis son portable, c’est par contre bien avec les gens – et à commencer par celles et ceux de son équipe – qu’il veut faire avancer le train, dont celui de la «synodalité». Cette notion lui plaît, il la prononce souvent et veut la pratiquer.
Lorsque l’on évoque l’actualité et les tumultes qui échirent présentement l’Eglise catholique, le chanoine Joseph ne se dérobe pas. Sa congrégation a également été touchée par plusieurs cas d’abus sexuels et «c’est une souffrance évidemment. Nous vivons un temps particulier mais c’est un bienfait que ces dérapages soient révélés, ce d’autant que l’on ne peut pas exclure de nouvelles turbulences, même si je déplore un certain acharnement de la presse et un manque de nuances» confie-t-il.
Le besoin d’une prise de conscience
«Notre nouveau prévôt, Jean-Pierre Voutaz, se montre très à l’écoute et fait preuve de beaucoup de discernement pour que notre congrégation tire des enseignements de ces événements spéciaux. Ils nous poussent à une prise de conscience sur notre propre rôle qui n’est plus le même qu’autrefois. Si autorité il y a, ce doit être dans l’amour et le service et non dans un esprit de pouvoir» dit-il. «Aucun d’entre nous ne doit prendre le dessus sur les autres et notre prévôt y veille. J’admire aussi les paroissiens qui savent faire la part des choses et je ne ressens personnellement aucune animosité de leur part» se réjouit-il. Vivre en congrégation avec ceux qui ont fauté n’est pas forcément simple, le chanoine en convient, mais, dit-il, «ils restent nos frères et nous devons continuer à les considérer comme tels».
Les trains roulent par tous les temps. Lorsqu’il passe du temps des loisirs à bricoler sa maquette géante, le chanoine Joseph se dit peut-être que ses deux trains paroissiaux sont comme de vrais convois ferroviaires: ils avancent par tous les temps! Il faut juste que l’aiguilleur soit là pour actionner les bons leviers!
Claude Jenny